Résumé

Pièce originale en anglais de John Murrell
Adaptée par Eric-Emmanuel Schmitt en 2002

Eté 1922, Sarah Bernard face à son dernier été sous le soleil de sa propriété de Belle-Ile-En-Mer. Elle revit sa vie avec la complicité de son secrétaire Georges Pitou.

Critiques

Le Canard Enchaîné - « Sara (Ah Sarah, ça ira!...) »

C’est une histoire de cabots. Mais de cabots de génie. Sarah Bernhardt, la coruscante saltimbanque à la jambe de bois – un accident de scène, apprend-on ici -, la fille « d’une des plus les plus brillantes de Paris, c'est-à-dire du monde, devenue riche et presque respectable à force de mettre des ministres dans son lit, enfin, un à la fois généralement », vit son dernier été dans sa propriété de Belle-Ile. Nous sommes en 1922. La mer est là derrière le muret de la terrasse. Parfois, on entend son ressac. Fanny Ardant prête à Sarah son allure et son abattage : assez pour convaincre les réfractaires à son charme qu’elle est irremplaçable.

 L’autorité apaisante de Bernard Murat, le metteur en scène, n’y est sans doute pas pour rien.

A ses côtés, son secrétaire esclave, Georges Pitou. Lui c’est Robert Hirsch, et les tics il s’en fout : il les bouffe, il s’en repaît. Au bord de la tragédie, il s’en pourlèche les zygomatiques. Il s’en turlupine les badigoinces. Il en délecte les grincheux. Pour mieux se sentir inspirée dans la rédaction de ses Mémoires, la tyrannique superstar dont Mark Twain disait : « Il y a cinq sortes de comédiennes, les mauvaises, les passables, les bonnes, les grandes et puis il y  a Sarah Bernhardt » - et Sigmund Freud : « Le moindre centimètre de ce personnage vit et vous ensorcelle… » - oblige son souffre-douleur à faire le pitre. A mimer devant elle les êtres dont elle parle : Judith, cette mère qui ne l’a jamais aimée, par exemple, et qui la trouvait laide. Sarah dicte les répliques. Les exige réalistes, vachardes. Mais se rebiffe mordicus dès que Pitou lui porte ombrage, c’est à diore à chaque instant : « Je te voyais devenir une créature rebelle, échevelée, à la voix stridente, au profil dur et sémite… » Pitou picole un petit coup de sherry pour s’encourager – avec la permission de Madame. Pitou renaude. Fait sa coquette, refuse d’apporter une ombrelle : parce qu’à l’âge de Madame, surtout dans son état, on ne saurait rester dehors.

Tout le spectacle est là. Dans ce duo sadomaso, dramatique et rigolo qui unit la sculpturale divinité des planches et ce bout de porcelaine fragile qu’elle martyrise : « Pitou, vous me faites penser à ces petites bêtes que l’on trouve sur la plage à marée haute… Elles n’ont pas de système nerveux bien qu’elles se tortillent en changeant de couleur dès qu’on les touche. Je vous aime beaucoup, Pitou. »

Eric-Emmanuel Schmitt, à qui l’on doit l’adaptation de la pièce de John Murrell, a dû beaucoup s’amuser à rédiger ce texte sur mesure. Même si l’on se sent parfois frustré des épisodes les plus fous de l’existence de cette furie qui incarna Phèdre, Lorenzaccio, l’Aiglon. Qui dormait dans son cercueil, pas toujours seule, et que le bruit de sa jambe de bois sur le parquet faisait surnommer « le bâtonnier ». Ses folies à New York, ses fauves à Belem, au bord de l’Amazone, son insolence partout. Le soleil peut toujours se coucher – c’est sont habitude remarquent-ils, à la fin de la journée, il ne reste plus à Robert Hirsch qu’à endosser son rôle le plus émouvant, celui de Oscar Wilde à l’agonie, rencontrant à Saint-Tropez la Divine qui se meurt aujourd’hui : « Promettez-moi de ne pas mourir, Sarah. » « C’est une idée à laquelle je vais réfléchir. »

Le contrat est rempli. Merci Bernard Murat. Le contrat pourra de nouveau se lever. C’est une habitude qu’il a le matin.

 

B.Th.

Publications

Publié par les éditions Avant-scène et DVD disponible chez Warner.

Au théâtre

Créée au Théâtre Edouard VII à Paris en 2002
Avec Fanny Ardant, Robert Hirsch
Mise en scène de Bernard Murat
Décor de Nicolas Sire